Roland-Garros 2025 – Finale messieurs – Carlos Alcaraz est-il entré pour de bon dans la tête de Jannik Sinner ?

A ce niveau, on ne peut même plus appeler cela de la confiance. C’est une forme de certitude. Vendredi soir, quand Novak Djokovic a tenté par tous les moyens de changer le cours de sa demi-finale face à Jannik Sinner, notamment en fin de 2e puis en fin de 3e set, l’Italien a toujours trouvé la solution. Dans la tempête, celle que faisait souffler son adversaire, poussé en prime par les bourrasques d’un public tout acquis à sa cause, Sinner est resté droit dans ses bottes. Dans ces instants-là, sa force de conviction a dégagé quelque chose de presque palpable. Mais dimanche, qu’en sera-t-il ?

Les rapports de force constituent un paramètre essentiel au plus haut niveau. Ils varient selon les êtres, les périodes et les contextes, ces derniers tenant notamment aux surfaces de jeu. Jannik Sinner est l’incontestable numéro un du tennis mondial. Il a remporté les deux derniers titres du Grand Chelem. Il a gagné environ 93% de ses matches depuis le mois d’octobre 2023 (104 victoires pour seulement 8 défaites). Depuis Toronto en août dernier, il n’a subi que deux revers en 49 rencontres. Ses deux matches contre Carlos Alcaraz. Problème, c’est cet homme qu’il va devoir affronter dimanche s’il veut épingler Roland-Garros à son palmarès.

Et une amortie pour achever Sinner : la balle de titre d’Alcaraz en vidéo

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Les chiffres commencent à faire mal

Deux duels, deux finales, à Pékin l’automne dernier (le match de l’année) puis à Rome, deux défaites. En réalité, Carlos Alcaraz a même dominé leurs quatre derniers matches, en ajoutant la demi-finale de Roland-Garros l’an dernier et celle d’Indian Wells trois mois plus tôt. Jannik Sinner avait pourtant déjà glané son premier titre majeur à ce moment-là. Depuis que Sinner est devenu Sinner, il a donc toujours perdu face à son rival venu d’Espagne.

“Les chiffres sont là, Alcaraz a pris l’ascendant, constatait Justine Henin après la finale de Rome il y a trois semaines. Ça ne veut pas dire que tout ça ne va pas changer à l’avenir, mais les chiffres commencent à faire mal. Alcaraz, à son meilleur, avec les armes qui sont les siennes, a tout pour bousculer Sinner. Puis il a cette capacité à se transcender les jours de finale. Il l’a prouvé encore à Rome. Il a un ascendant dans leurs confrontations directes et encore plus sur terre battue. A Rome, ça s’est fait sentir.”

Chacune de ces rencontres a sa propre histoire. Mais la somme de ces chapitres peut-elle constituer un tout, susceptible de conférer un réel avantage à Carlos Alcaraz à l’aube de leur finale ? A Rome, le numéro un mondial était en phase de reprise après ses trois mois de suspension. A Pékin, il ne lui avait manqué qu’une poignée de points. A Paris l’an dernier, il relevait tout juste d’une blessure à la hanche. Celle d’Indian Wells est peut-être la plus oubliée mais elle lui avait fait mal alors qu’il était invaincu depuis 19 matches. Reste qu’il a parfois été tout proche et peut s’appuyer sur ces occasions manquées.

De 0-3 à 7-3 : comment Alcaraz a déboussolé Sinner

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Le tournoi écrit sa propre histoire

“Même à Rome, souligne Mats Wilander, Sinner a vraiment eu sa chance dans le premier set, qui aurait pu basculer d’un côté ou de l’autre. S’il l’avait gagné, il aurait peut-être pu se libérer. Là, je ne suis pas étonné qu’il ait lâché prise après la perte de ce set.” Mais il n’y a pas de si en tennis, comme disait un certain Rafael N. L’ancien numéro un mondial suédois était aux premières loges au Foro Italico, au bord du court, pour vivre leur duel. Il en a tiré une leçon : “Jannik Sinner est probablement un peu trop près de la ligne de fond sur terre battue pour battre Alcaraz. Je pense qu’il peut le battre, mais il doit probablement s’adapter, car il manque de temps parce qu’il défend trop près de la ligne.”

Toute la question est de savoir ce qui sera le plus prégnant dimanche à l’heure de leur 12e confrontation, la plus importante de toutes jusqu’ici dans leur histoire commune. La confiance intrinsèque de Sinner, si manifeste vendredi soir, l’autorité qui a été la sienne ces deux dernières semaines, sans doute supérieure à celle d’Alcaraz, peut-elle prendre le dessus sur ce 4-0 du Murcien depuis plus d’un an ?

Voilà ce qu’Alex Corretja relevait juste avant le début de ce Roland-Garros. “Parce qu’il est le tenant du titre et parce qu’il a été dominateur sur terre battue cette saison, Carlos est le favori du tournoi, expliquait-il. Mais si Jannik et lui devaient se retrouver en finale, je pense que leurs chances de victoire seraient identiques. Le tournoi va écrire sa propre histoire pendant 15 jours et si Carlos a un petit avantage sur la ligne de départ, Jannik peut très bien hausser son niveau de jeu jusqu’à la finale.”

Corretja : “S’il y en a un qui peut battre Alcaraz sur terre au meilleur des 5 sets, c’est Sinner”

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Adaptation le jour J

Bien vu. Des deux, le plus impressionnant, ce fut lui sur le chemin de la finale. Pas un seul set perdu (contre quatre pour Alcaraz) et contre Djokovic, un très, très bon Djokovic, ce qui signifie beaucoup dans une demi-finale de Grand Chelem, il a encore hissé son niveau de jeu et d’intensité vers des sommets, en y ajoutant un sang froid reptilien dans les moments le plus décisifs. Il est impensable que ce Sinner-là puisse être une proie aisée, pas même pour Carlos Alcaraz, quoi qu’en dise leur passé récent ensemble.

Le Transalpin en est convaincu, la clé ne résidera pas tant dans les derniers mois que dans la capacité d’adaptation le jour même, puisque, selon la formule rabâchée mille fois, “chaque match est différent”. “Vous devez comprendre ce qui marche ou ne marche pas ce jour-là, parce que les choses changent d’un match à l’autre, a-t-il évoqué vendredi soir. Vous vous préparez d’une certaine manière, y compris tactiquement, mais vous devez vous apercevoir vite si vous avez besoin de modifier certaines choses.”

Reste que, tôt ou tard, dans cette finale, viendra forcément le moment où la confrontation de ces deux réalités sera inévitable. Une fin de set. Un tie-break. Une balle de break à sauver. C’est sur cette poignée de coups et de points, et pas avant, que l’on saura et eux avec nous ce qui, des certitudes si ancrées de Sinner et de ses doutes plus ou moins profonds face à Alcaraz, pèse le plus lourd. Roland-Garros va se jouer sur le rapport de force entre ces deux histoires contradictoires et pourtant si intimement liées.

“Alcaraz a des armes supplémentaires par rapport à Sinner”

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